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Vue de l'exposition: Bernar Venet, Le tas de charbon, 1962
Vue de l'exposition: Bernar Venet, Le tas de charbon, 1962
Vue de l'exposition: Bernar Venet, gravures
Vue de l'exposition: Bernar Venet, gravures
Random Combination of Indeterminate Lines, aquatinte, 162 x122 cm, 1995-96
Combinaison aléatoire de lignes indéterminées, pointe sèche, 110 x 140 cm, 1993
Quatre lignes indéterminées, techniques mixtes, 117.5 × 159.4 cm, 2014
Straight Lines / Dispersion, sérigraphie, 162.5 X 121.9 cm, 1998
Deux lignes indéterminées, acier corten roulé, 265 x 322 x 305 cm, 2012
Installation de la sculpture de Bernar Venet près de l'église Saint-Pierre
Installation de la sculpture de Bernar Venet près de l'église Saint-Pierre
Disorder: 11 Uneven Angles, acier corten, 800 x 260 x 205 cm, 2015

L'Orangerie, espace d'art contemporain fête son 21ème anniversaire en invitant Bernar Venet à exposer à Bastogne.

Sous le commissariat de Bernard Marcelis;

On peut y découvrir trois aspects de son travail, à commencer par deux sculptures monumentales  placées dans l'espace public: l'une relevant de sa récente série sur les "Angles", l'autre de celle des "Lignes indéterminées".

Pour la première fois une exposition est consacrée à une sélection de ses gravures et autres grandes estampes sur papier, alors que la rotonde de L'Orangerie accueille son "Tas de charbon" (1963), la première sculpture informelle et sans dimension spécifique de l'histoire de l'art.

Ce projet ambitieux offre un condensé de la pratique de l'artiste français, toujours à la recherche de nouveaux défis.

Deux sculptures monumentales

A l’inverse des “Arcs” ou des “Lignes indéterminées”, les sculptures angulaires de Bernar Venet sont beaucoup plus rares dans sa production.

Souvent fichées dans le sol, les sculptures extérieures viennent occuper l’espace de façon déterminée, presque incisive, en le scandant par leur aspérité, comme celle qui se trouve devant le siège d’Arcelor-Mittal à Luxembourg. Les “Lignes indéterminées” quant à elles - telle que celle installée actuellement dans le Parc Elisabeth à Bastogne - le font d’une manière plus enveloppante. Ces dernières apparaissent constitutives de ce qu’on pourrait appeler la face baroque de l’œuvre de Venet, alors que les “Angles” se rattacheraient plutôt à l’aspect minimaliste et radical de celle-ci. Les oeuvres angulaires de Venet possèdent un aspect conquérant, dynamique. Elles prennent possession d’un lieu (ou parfois même d’un bâtiment) qu’elles surmontent et dominent. 

 En marquant ainsi sa puissance, l’œuvre s’impose à son environnement dans un dialogue d’égal à égal, dans un rapport d’échelle adéquat. Si l’agglomération d’”Arcs” et de “Lignes indéterminées” est fréquente dans la démarche de l’artiste français, celle d’”Angles” est beaucoup plus rare et remonte à peine à l’année 2015, date de la présentation à Venise de  “Disorder 9 Uneven Angles”, dans les jardins du Palazzo Cavalli-Franchetti. Constituée de neuf angles de hauteur variée et d’amplitude différente, ceux-ci aboutissent à un faisceau acéré qui entrait en dialogue formel avec les étroites fenêtres gothiques de la façade du palais. 

 Cette  sculpture annonce celle installée à Bastogne, composée elle de 11 angles juxtaposés côte à côté, de façon à former un ensemble compact. A la différence des œuvres antérieures évoquées auparavant, les “pieds” de l’œuvre sont sur le même plan, ce qui lui donne sa configuration verticale, alors que la plupart des angles antérieurs se présentaient de façon horizontale, souvent en dialogue avec le bâti des lieux. Dans un espace urbain, même dégagé, où elle est installée à Bastogne, c’est la verticalité qui prime, dans un dialogue que l’on pourrait qualifier de triangulaire avec la Porte de Trêves et l’église Saint-Pierre.

Comme souvent chez Venet, une pièce isolée constitue l’amorce d’une série en devenir. Même s’il lui a fallu longtemps pour reprendre son travail sur les angles, les actuels “groupes d’angles” en sont les héritiers. Entretemps, les principes d’équilibre ont été rompus et les pièces se sont libérées d’une installation trop attendue en défiant la pesanteur. On a pu les voir de guingois contre un mur, parfois effondrées dans des amoncellements dont sourd toujours cette même puissance de l’acier corten usiné et livré brut sur le lieu de l’exposition. Depuis ses effondrements de lignes droites, on sait que Venet n’hésite plus à bousculer ses pièces, en les renversant ou en les installant de façon aléatoire sous l’effet de la pesanteur. On connaissait les “Lignes indéterminées” de ce type, les “Angles” viennent désormais les rejoindre et s’imposer avec la même évidence formelle.

Bernard Marcelis (2015-2017)

 Un projet ambitieux pour Bastogne

L'origine de ce projet était de fêter avec éclat le vingtième anniversaire de la creation du Centre d'art L'Orangerie à Bastogne, en faisant appel à une figure majeure de l'art contemporain, le sculpteur français Bernar Venet.

Son œuvre a été exposée dans le monde entier, de Paris à New York et de Berlin à Séoul.  Tout récemment, elle l'a été à Bordeaux, Marseille, Versailles et Venise, lors de la dernière Biennale. C'est notamment une œuvre monumentale de la série des "Angles", exposée à Venise, que nous souhaitons amener à Bastogne.

Ces œuvres à dimension urbaine sont conçues pour l'espace public et nous estimons que l'entité de Bastogne, avec le parc Elisabeth et la pelouse de la Porte de Trêves, pourrait recevoir ces sculptures le temps d'un été, celui des 21 ans du Centre d'art. De son côté, celui-ci accueillera une sélection des meilleures gravures et lithographies de Venet, où l'on pourra percevoir tout son travail sur la matière graphique et le support papier. Dans la rotonde sera installé son fameux "Tas de charbon" (1963), la première sculpture informelle et sans dimension spécifique de l'histoire de l'art.

Il s'agit donc là d'un projet ambitieux, offrant un aperçu condensé de la pratique d'un sculpteur contemporain, perpétuellement à la recherche de nouveaux défis.

L'installation de sculptures dans la ville et dans ses espaces verts permettra un dialogue avec les habitants et les autres utilisateurs de l'espace urbain, le travail de médiation de L'Orangerie prenant tout son sens dans ce contexte.

Inviter une personnalité telle Bernar Venet à Bastogne constitue aussi pour nous une façon de placer la ville sur la carte des grands événements culturels de la Wallonie et de la Belgique cet été.

Cette ambition avait été initiée en 2014 avec la remise en valeur des mosaïques de Fernand Léger de la crypte du Mardasson. Cet élément du patrimoine artistique moderne (et historique du point de vue militaire) de la Province du Luxembourg est exceptionnel. Il devrait pouvoir servir de référence à une programmation artistique ambitieuse - telle qu'en leur temps la réalisèrent les protagonistes de la commande à Fernand Léger - comme le propose cette année L'Orangerie avec ce projet de Bernar Venet.

Biographie sommaire

Bernar Venet est né en 1941 à Château-Arnoux-Saint-Auban, dans les Alpes de Haute-Provence.

Il part pour Nice à l'âge de 17 ans et dès 1963, après son service militaire, il se consacre entièrement à la création artistique. En 1966, il s'installe à New York, où il développe un travail conceptuel de premier ordre. Il  côtoie également les artistes représentatifs du courant d'art minimal, tels Carl André, Donald Judd ou Frank Stella. 

En 1971, il abandonne toute création artistique pour se consacrer à l'enseignement et à la tenue de conférence, en France et en Europe. Il retourne à New York en 1971 et se remet à travailler: ce sont les toiles de la série des "Angles et des Arcs", bientôt suivies par les premières sculptures de ses fameuses "Lignes indéterminées" (1979). Depuis les commandes publiques, les expositions personnelles dans les plus grands musées, les installations temporaires de ses sculptures dans l'espace public, se succèdent sans répit à travers le monde. 

Il réalise lui-même la plupart de ses sculptures dans un atelier en Hongrie. Lui-même est établi dans la Var où il conçoit ses œuvres et en expérimente la présentation dans les ateliers de sa propriété du Muy. Depuis 2014, celle-ci a été transformée en Fondation Venet, devenue un haut lieu de l'offre artistique estivale en France. Elle est plus qu'un espace consacré à ses oeuvres, car Venet est autant passeur que créateur. Régulièrement, d'autres artistes sont invités à occuper les lieux pour des expositions d'envergure.