Nadine Preiser °1952, sculptures
Elle élance la courbe à la verticalité de la matière. Tout contre elle, la Terre au Levant et au Ponant de ses infinitudes inflexions. Celles-ci sont aussi tisses et chatoyantes que la nacre; comme moirées et parées par ce tout que les horizons ont fait mire étant en leur sol qu'en leur grand large. On y décèle des humeurs de volumes affinés par le bois de carène, le bois d'écriture, le bois d'offrande, le bois funéraire, le bois de gravure, le bois de gréement, le bois de totem, le bois des tambours. On pénètre les senteurs des embruns, les effluves des encens, les fragrances des couleurs qu'elles ont frayées. Entre la peau de l'écorce, le corps de la forme et la chair de leur terre, j'aime m'empreindre des rinceaux qu'offrent leurs mémoires réfractées dans leurs veines, leurs digues, leurs fibres, leurs étoffes. J'y erre des pensées de chemins en voyage comme autant de traces de vie minéralisée, exaltées dans les manuscrits de l'immanence. Rien, ici, n'est clos. Rien n'abrège la pensée à l'occupation d'une image. L'œuvre précède constamment te regard afin, d'abord de l'accueillir comme hôte en ses jardins païens. Les œuvres nous invitent à les rejoindre dans les replis secrets de leur silence. J'ai été éveillé aux méditations que murmurent les brises de leurs voluptés. Parfois, l'immobilité de leur présence tresse des paysages de lointaines errances où on aurait aimé les avoir décelées. Mais, cela ne peut, car elles sont enracinées, saisies dans leur propre monde où aucun réel n'est à posséder. Alors, œuvres dressent leurs amplitudes en des sillons et des fronces de fresques pétries du feuillage des lumières du dedans et du dehors.
Etendues et serrées comme le bois de l'arc, d'une rive à l'autre de leur puissance, les sculptures habitent des baies de clarté en abside. Leurs oblicités ruissellent des résonances de mondes nuées par des mémoires inépuisées. D'autres, bardent les espaces que vivent les aurores de l'augure, ainsi que les rosées qui les ont baignées.
Cela s'effleure, affleuré par des tonalités de futaie, de crypte, de falaises vives où brésillent des lueurs de feu dans la risée du vent. Ce vent qui fouette toujours l'âme des premières images que l'Homme a vu apparaître dans sa demeure originelle.
Puis, c'était comme si le temps avait desserré les nœuds de sa démesure afin de reposer les entailles, les éraflures, les éclisses, les plaies, les peines, les douleurs heurtées en sa folle parabole afin de traiter des alliances avec les derniers nomades de la planète bleue. Il y a, ici, une parure de l'inextricable mystère, érigée par-delà l'ébahissement fractal qui nous consterne, dans lequel nous nous obstinons toujours à être inconnus à la vie, atterrés de vivre. Christian Coppin, texte et photographies