"Annabelle attaque le bois et le bois attaque Annabelle."
Délicatement brutes, tronçonnées avec sensibilité, les monumentales sculptures en bois d’Annabelle Hyvrier entremêlent poésie du vivant et force de la nature pour une vision la fois tendre et brute sur la réalité. C’est à Tolède que la sculpteur plasticienne française découvre le travail de Le Greco et décide de s’inspirer des visages déformés de ses apôtres pour tailler toute en subtilité ses propres saints dans le bois de cèdre qu’elle affectionne. Formée l’Académie des Arts de Bruxelles, Annabelle Hyvrier découpe, tranche, fractionne, excise le bois avec précision et offre avec cette nouvelle exposition un regard à la fois primitif et gracieux sur le lien immuable entre nature et spiritualité. E. Pouzet
La sculpteuse Annabelle Hyvrier a développé un ensemble monumental présenté à même le sol, conçu à partir d’une étude de la série d’apôtres du Greco. Un même grand tronc de cèdre, abattu en Belgique, a servi à toutes les sculptures. Quelques pièces abstraites parallèles à ce projet permettent d’ouvrir le champs du regard.
A coups de tronçonneuse et de foreuse, elle s’attaque à la masse de manière brute, laissant une déclinaison variée de traces d’outil, devenues des forces d’expression. L’artiste décide de la finition d’une oeuvre à différents stades du processus sculptural. Il en résulte des formes plus ou moins dégrossies, des lignes d’ébauche et parfois même l’écorce ou des formes plus finies.
Hyvrier, en s’inspirant d’un artiste aux couleurs audacieuses, n’a pas hésité à extraire l’essence de ces dernières, par coups de pinceau grossiers, par taches synthétiques bien définies ou par signes iconographiques. Ce travail évoque la tradition de la polychromie, réactualisée.
Le groupe sculpté dégage un effet à la fois brut, pop et primitif, expressionniste et spirituel. La mise en scène en couloir invite le spectateur à déambuler au centre de ces apôtres à la fois massifs et humbles. Au bout dans la rotonde, légèrement décentré, trône le Christ monumental et imposant. Annabelle Hyvrier a consacré le segment le plus large du tronc, à la lisière des racines, pour dégager cette présence ancrée.
Les sculptures silencieuses dépassent largement le contexte religieux et invitent au recueillement et à l’introspection.
Hélène Jacques